04-06-2018

La C.C.T. n° 109 relative à la motivation du licenciement prévoit que le travailleur a le droit de connaître les motifs qui justifient son licenciement. Lorsque l’employeur n’a pas communiqué d’initiative ces motifs au moment du licenciement, le travailleur doit lui adresser, par lettre recommandée, une demande par laquelle il manifeste son souhait de connaître les motifs de son licenciement

En cas de rupture immédiate du contrat de travail, cette demande doit être adressée, dans un délai de deux mois, à compter du moment où le contrat prend fin. Si le préavis doit être presté, le travailleur peut introduire sa demande dans un délai de six mois, à compter de la date de la notification du congé sans que ce délai, ne puisse toutefois être supérieur à deux mois après la fin du contrat.

L’employeur doit alors répondre, par courrier recommandé, dans un délai de deux mois à compter de la réception de la demande. Cette réponse doit contenir les éléments qui permettent au travailleur de connaître les motifs concrets de son licenciement.

Quelles sont les conséquences si l’employeur ne répond pas au travailleur dans le délai prévu ?

C’est à cette question que répond la Cour du Travail de Liège dans un arrêt du 24 avril 2018.

Une employée avait été licenciée par son employeur avec effet immédiat et moyennant paiement d’une indemnité de préavis. L’employeur lui avait fait part de sa décision à l’occasion d’une réunion. Il renseigna sur le formulaire de chômage C 4 le motif suivant : « licenciement pour raisons économiques ».

Quelques jours plus tard, l’employée lui écrivit en réclamant de connaître les motifs précis du licenciement. L’employeur ne lui répondit pas.

La Cour du Travail rappelle qu’en pareil cas, l’employeur est tout d’abord redevable d’une amende civile, correspondant à 2 semaines de rémunération. La Cour considère que la mention reprise sur le formulaire de chômage C 4 était insuffisante et manquait de précision. De même, l’employeur ne pouvait se prévaloir de l’existence d’un entretien préalable au licenciement, au cours duquel l’employée aurait été informée des motifs justifiant sa décision, puisqu’il ne s’agit pas d’une communication écrite de ces motifs. La Cour condamne donc l’employeur à payer à l’employée une amende civile correspondant à 2 semaines de rémunération.

La Cour du Travail rappelle ensuite, et dans un second temps, que l’absence de communication des motifs du licenciement a pour conséquence que l’employeur supporte la charge de la preuve de l’existence des motifs qu’il invoque, et de ce que ceux-ci pouvaient raisonnablement justifier le licenciement.

En l’espèce, la Cour retient que l’employeur ne rapporte pas la preuve des faits qu’il invoque, étant l’existence de raisons d’ordre économiques. Elle constate que le licenciement intervient quelques mois après que l’employée ait manifesté le souhait d’être régularisée, puisqu’elle prestait dans le cadre de différents contrats à durée déterminée qui avaient été reconduits au-delà de ce que la loi autorisait. La Cour en déduit que le licenciement est intervenu en représailles à cette revendication.

Compte tenu de l’absence de preuve de l’employeur, et de la suspicion que le licenciement soit en réalité une mesure de rétorsion, la Cour fixe à 17 semaines l’indemnité pour licenciement manifestement déraisonnable à laquelle l’employeur est condamné.

 

Qu’en penser ?

 

L’employeur qui ne donne pas suite à la demande du travailleur de pouvoir connaître les motifs précis qui justifient son licenciement s’expose à une double sanction ; d’une part, il devra payer une amende civile correspondant à 2 semaines de rémunération. D’autre part, il supportera seul la charge de la preuve, non seulement de l’existence des motifs qui justifient le licenciement, mais aussi du caractère manifestement raisonnable de ceux-ci, au risque de devoir payer une indemnité complémentaire pouvant aller jusqu’à 17 semaines de rémunération.

 

Réf. : C.T. Liège, div. Namur (6ème ch.), 24 avril 2018, RG n° 2017/AN/76

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