14-01-2019

La loi du 19 mars 1991 assure la protection contre le licenciement des représentants du personnel au sein du Conseil d’Entreprise et du Comité pour la Prévention et la Protection au Travail. Elle met notamment en place une procédure qui oblige l’employeur à solliciter l’autorisation préalable de la Commission Paritaire compétente ou du Tribunal du Travail avant de licencier le travailleur protégé. Le non-respect de cette procédure expose l’employeur au paiement d’importantes indemnités.

L’employeur peut-il toutefois opposer au travailleur protégé que la réclamation de ces indemnités est abusive ?

C’est à cette question que répond la Cour du Travail de Liège dans un arrêt du 21 septembre 2018.

Un travailleur est élu comme délégué effectif au Conseil d’Entreprise à l’occasion des élections sociales qui se tiennent en 2012. L’employeur se plaint ultérieurement de l’attitude de ce travailleur, qui fait l’objet de plaintes de plusieurs clients et auquel il est reproché d’utiliser de manière inappropriée et sans lien avec sa fonction le matériel informatique mis à sa disposition.

L’employeur licencie alors irrégulièrement le travailleur pour motif grave en date du 17 juillet 2015. Celui-ci sollicite sa réintégration au sein de l’entreprise, ce qui lui est accordé. Les parties engagent alors des négociations pour régler leur litige.

Elles s’accordent finalement sur un licenciement avec effet immédiat et paiement d’une indemnité de préavis calculée sur base des règles ordinaires, le travailleur renonçant pour le surplus aux indemnités de protections prévues par la loi du 19 mars 1991 et l’employeur ne sollicitant pas la reconnaissance préalable d’un motif grave.

Les parties signent une convention qui consacre leur accord.

Toutefois, et quelques semaines plus trad, le travailleur réclame à l’employeur le paiement des indemnités de protection auxquelles il avait pourtant renoncé, faisant valoir que sa renonciation est nulle puisque intervenu de manière prématurée.

Il obtient initialement gain de cause devant le Tribunal du Travail.

En appel, l’employeur conteste la demande du travailleur et invoque notamment l’abus de droit.

Dans son arrêt, la Cour du Travail constate tout d’abord que la renonciation du travailleur aux indemnités de protection prévues par la loi du 19 mars 1991 est effectivement nulle. Se basant sur une jurisprudence constante de la Cour de Cassation, la Cour du Travail rappelle que cette renonciation ne peut valablement intervenir au plus tôt qu’à l’issue d’un période de 30 jours suivant la rupture du contrat de travail. En conséquence, le travailleur est bien en droit d’obtenir le paiement des indemnités de protection qu’il réclame.

Ensuite, la Cour du Travail examine la question de l’abus de droit. Elle constate que le travailleur a signé la convention qui avait été signée à l’intervention de son organisation syndicale et que la solution négociée l’agréait initialement, puisque son employeur renonçait à invoquer un motif grave. La Cour du Travail considère que dans ces conditions, le travailleur abuse de son droit et qu’il doit en conséquence indemniser son employeur du préjudicie subi, étant le paiement de l’indemnité nette correspondant aux indemnités de protection contre le licenciement.

En revanche, la Cour du Travail considère que l’employeur reste tenu de payer les cotisations sociales et le précompte professionnel sur ces indemnités.

 

Qu’en penser ?

 

La réclamation, par un représentant du personnel, des indemnités de protection contre le licenciement prévues par la loi du 19 mars 1991 peut, dans certains cas, être abusive.

Toutefois, dans ce cas, l’employeur reste tenu de payer les cotisations sociales et le précompte professionnel, seule l’indemnité nette pouvant faire l’objet d’une compensation entre les sommes dues au travailleur et le montant du préjudice subi par l’employeur suite à l’abus du travailleur.

 

Réf. : C.T. Liège, 21 sept. 2018, RG n° 2017/AL :568

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