23-10-2019

Dans un arrêt du 29 avril 2019, la Cour du travail de Liège examine le licenciement pour motif grave d’une travailleuse ayant consommé de l’alcool sur son lieu de travail.

En l’espèce, Madame D. avait été licenciée pour motif grave le 6 mars 2015 par la société qui l’employait. La lettre notifiant les motifs du licenciement faisait référence à une réception donnée le 5 mars 2015 sur les lieux du travail pendant laquelle Madame D. avait consommé des boissons alcoolisées. Suite à cet événement, Madame D., en état d’ébriété manifeste, avait causé des débordements et eu des comportements injurieux et outranciers à l’égard des clients et de son  employeur. Selon ce dernier, ces faits étaient révélateurs d’un manque de conscience professionnelle et constituaient des manquements graves rendant immédiatement et définitivement impossible toute collaboration.

Dans sa décision, la Cour précise que le juge, lorsqu’il apprécie la gravité de la faute, peut prendre en considération toutes les circonstances de nature à l’éclairer sur la gravité du fait fautif.

Lorsqu’elle analyse les éléments circonstanciels de l’affaire, la Cour observe que les faits reprochés à Madame D. ne sont que le résultat de son état d’ivresse - qui est par ailleurs établi - et qu’en conséquence, l’enivrement de Madame D. constitue le motif primaire justifiant aux yeux de l’employeur le motif grave.

Or, en examinant les conditions dans lesquelles l’imprégnation alcoolique s’est réalisée, la Cour constate que la réception du 5 mars 2015 était organisée - ou à tout le moins tolérée - par l’employeur de telle sorte que les travailleurs ont pu se sentir encouragés ou autorisés à consommer des boissons alcoolisées. De plus, le représentant de l’employeur, qui était titulaire de l’autorité patronale, a lui-même montré l’exemple d’une telle consommation en étant lui-même ivre.

En conséquence, la Cour conclut que la consommation d’alcool sur le lieu de son travail au point d’être grisé est un acte fautif dans le chef de Madame D. mais que l’attitude de la travailleuse eu égard aux circonstances doit être appréciée avec plus de souplesse et ne peut justifier son licenciement pour motif grave.

 

Qu’en penser ?

 

Bien que la consommation d’alcool sur les lieux du travail et les débordements causés par l’état d’ivresse qui en découle consistent en un comportement fautif, cette faute n’emporte pas automatiquement un motif grave et il convient d’avoir égard à toutes les circonstances du dossier.

En l’occurrence, un employeur qui a pu, en partie, encourager la consommation d’alcool sur les lieux du travail créant l’état d’ivresse de son travailleur, en autorisant - ou en tolérant - un événement dans lequel il y a des boissons alcoolisées et à l’occasion duquel il est lui-même ivre, ne peut prétexter de cette faute pour justifier d’un motif grave rendant immédiatement et définitivement impossible toute collaboration professionnelle entre lui et son travailleur.

 

Réf. : C.T. Liège, 29 avril 2019, RG n° 2018/AL/509

Retour